Lettre internationale – mai-juin 2024

Union européenne – En mai 2024, plusieurs pays de l’Union européenne (UE), dont la France, l’Allemagne et la Pologne, ont pris position contre la désinformation en publiant une déclaration et des propositions visant à protéger les pays candidats à l’UE. Le Conseil de l’UE a également pris position sur une directive anti-corruption visant à unifier les règles pour combattre la corruption dans les secteurs public et privé. La création d’un organe éthique européen a été actée pour renforcer l’intégrité et la transparence au sein des institutions de l’UE.

International – Le Groupe d’Etats contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECO) a publié divers rapports sur la corruption et la transparence au sein de l’exécutif, notamment en Lituanie et en Suisse, soulignant des progrès et des lacunes dans la mise en œuvre de ses recommandations.

France – Une nouvelle loi, en attente de promulgation par le Président de la République, visant à prévenir les ingérences étrangères a été adoptée par le Parlement le 5 juin 2024.

 

UNION EUROPÉENNE

Lettre internationale – mai-juin 2024

Le 21 mai 2024, en marge du Conseil des Affaires Générales (CAG), la France, l’Allemagne et la Pologne, accompagnés de 12 autres pays, ont publié une déclaration pour afficher une position commune dans le cadre de la lutte contre la désinformation et les ingérences étrangères. Ces pays ont également publié une liste de 20 propositions qui incluent les pays candidats à l’UE, cibles privilégiées de la désinformation. La stratégie de lutte contre cette tendance devrait être concentrée autour de l’Ukraine, des Balkans occidentaux, de la Moldavie et de la Géorgie, concernés par l’élargissement de l’UE et dont les opinions publiques sont vulnérables à la désinformation. La protection des processus électoraux a également été évoquée lors du CAG. (Contexte, 22 mai 2024)

Le 14 juin 2024, le Conseil de l’Union européenne a arrêté sa position concernant le projet de directive anti-corruption. Pour la première fois, ce texte regroupe un acte juridique unique dictant les règles relatives à la corruption dans les secteurs public et privé. Il existe actuellement trois textes relatifs à la corruption : un texte de 2003 traitant de la corruption dans le secteur privé, une convention de 1997 concernant la corruption de fonctionnaires européens ou ceux des États membres de l’UE et une directive de 2017 concernant les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union. L’harmonisation de la lutte anti-corruption permettrait d’améliorer son efficacité. Les peines seraient harmonisées. Chaque État resterait cependant compétent à l’égard des infractions commises sur son territoire. Le Conseil de l’UE doit à présent négocier avec le Parlement européen (qui a arrêté sa position en février 2024) pour s’accorder sur une version finale du texte, commune. (Conseil de l’UE, 14 juin 2024)

Lettre internationale – mai-juin 2024

Le 15 mai 2024, plusieurs institutions de l’Union européenne, dont le Parlement, le Conseil et la Commission, ont signé un accord pour la création d’un organe éthique européen. Cet organisme interinstitutionnel sera chargé de définir et de promouvoir des normes éthiques minimales communes pour les membres de ces institutions et organes consultatifs. L’objectif est de renforcer l’intégrité, la transparence et la confiance des citoyens dans les travaux politiques, législatifs et administratifs de l’Union. L’accord prévoit également des mécanismes pour garantir le respect de ces normes, une coopération interinstitutionnelle accrue et la possibilité pour d’autres organes de l’Union de se joindre volontairement à cette initiative. Le cadre et les principes de fonctionnement de cet organisme porteront une attention particulière à l’indépendance et à la diversité des experts qui assisteront l’organisme (Commission européenne, 15 mai 2024).

Lettre internationale – mai-juin 2024

Une enquête réalisée par plusieurs médias européens a mis en lumière les activités parallèles de certains députés européens qui semblent parfois incompatibles avec leurs fonctions en raison d’un risque de conflit d’intérêts. Un rapport de Transparency International de mai 2024 a également dévoilé l’origine des revenus annexes des députés. Sur 705 parlementaires, 452 ont déclaré exercer une activité en parallèle de leur mandat. Ces activités sont variées mais correspondent souvent à des activités liées à des entreprises privées inscrites sur le registre des représentants d’intérêts de l’UE. Ces intérêts croisés se retrouvent dans une grande partie des pays européens représentés. De nombreux eurodéputés interrogés ont cependant démenti la potentielle influence de leur activité parallèle sur leurs fonctions parlementaires. La question soulevée par l’enquête se fonde sur la tension entre le besoin d’expertise de certaines commissions parlementaires et la surreprésentation de certaines professions dans celles-ci. Un seul élu, à ce jour, a reconnu être en situation de risque de conflit d’intérêts sur environ 800 déclarations d’intérêts (Le Monde, 24 mai 2024).

Lettre internationale – mai-juin 2024

A l’occasion de la mobilité d’un ancien directeur du département de la concurrence de la Commission européenne vers un cabinet d’avocats américain, la Médiatrice européenne a demandé à l’institution de publier les réserves dont il a fait l’objet. Le fait que ce soit le cabinet d’avocats qui se soit directement chargé de communiquer sur la mobilité du fonctionnaire et non pas la Commission pouvait, selon la Médiatrice, laisser entendre non seulement que ce cabinet d’avocats tirait un avantage particulier de cette mobilité grâce aux connaissances et à l’expertise du fonctionnaire, mais encore, qu’il y aurait de la part de la Commission une volonté de taire cette mobilité et ce faisant, une recherche d’opacité. La Médiatrice préconise donc aux fonctionnaires ayant réalisé une mobilité dans le privé de rendre publiques systématiquement les réserves dont ils font l’objet afin de garantir une certaine transparence. (Médiateur européen, 22 mai 2024)

ORGANISATIONS INTERNATIONALES

Lettre internationale – mai-juin 2024

Le 14 mai 2024, le GRECO a publié le premier rapport de conformité du 5e cycle d’évaluation sur la Lituanie portant sur la prévention de la corruption et la promotion de l’intégrité au sein des gouvernements centraux et des services répressifs. Le GRECO constate que sur les 17 recommandations faites précédemment, 4 ont été mises en œuvre de façon « satisfaisante », 7 ont été « partiellement » mises en œuvre et 6 ne l’ont pas été. Selon le GRECO, des progrès supplémentaires doivent être réalisés notamment concernant les règles sur les cadeaux et avantages aux personnes occupant les hautes fonctions de l’exécutif. Le GRECO recommande aussi de mettre en place un organisme indépendant doté d’un pouvoir de sanction, avec des sanctions clairement définies, afin de pouvoir mener des enquêtes en cas de violation du devoir de probité par ces personnes. Le GRECO souligne enfin les progrès à faire au sein des services répressifs notamment avec la création d’un mécanisme centralisé permettant l’harmonisation de mesures pour prévenir les conflits d’intérêts. (Conseil de l’Europe, 14 mai 2024)

Dans son rapport annuel 2023, le GRECO souligne la lenteur de la mise en place de certaines recommandations formulées aux États lors des différents cycles d’évaluation. Le GRECO considère en particulier qu’il est nécessaire de mettre en place plus de réglementations concernant les liens entre les lobbyistes et les responsables publics. Le GRECO considère qu’il est nécessaire d’améliorer les services répressifs afin que les dossiers soient traités de la même manière à chaque niveau de la hiérarchie. La lutte contre les ingérences étrangères est l’un des sujets phares à cet égard. Sont relevés les progrès réalisés par certains États membres, avec l’introduction de codes de conduite pour les personnes exerçant de hautes fonctions de l’exécutif. Pour les États évalués dans le cadre du 5e cycle d’évaluation, il apparaît que 58% des recommandations ont été partiellement ou entièrement mises en œuvre au 31 décembre 2023. En ce qui concerne les services répressifs, 67% des recommandations ont été entièrement ou partiellement mises en œuvre. Les recommandations concernant les parlementaires sont de celles qui ont été le moins mises en œuvre avec 20% de non appliquées. Le GRECO célèbre son 25e anniversaire en 2024. (Conseil de l’Europe, 30 mai 2024)

Le 19 juin 2024 à Vilnius, la secrétaire générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejčinović Burić, a ouvert la 21e conférence internationale contre la corruption. Le thème de cette conférence était : « Face aux menaces mondiales, défendre l’intégrité ». Plusieurs engagements ont été pris à cette occasion dont la protection des lanceurs d’alerte, les liens entre la corruption et les dégâts causés à l’environnement et la nécessité d’une réponse coercitive aux crimes de corruption. Enfin, l’utilisation de la technologie et le renforcement des capacités d’action des agences anti-corruption ont été soulignés comme indispensables à une lutte efficace contre la corruption. (IAAC, 21 juin 2024)

RÉSEAUX

Lettre internationale – mai-juin 2024

Le Réseau francophone d’éthique et de déontologie parlementaires attribuera pour la première fois, en 2024, une bourse de recherche à un étudiant de deuxième ou troisième cycle universitaire. Cette bourse vise à soutenir des recherches en français sur des thèmes liés à l’éthique et la déontologie parlementaires. La période de candidature pour cette bourse se déroulera du 13 juin au 13 septembre 2024. Le récipiendaire sera invité à présenter ses travaux lors de l’Assemblée générale annuelle du Réseau. (Réseau francophone d’éthique et de déontologie parlementaires, 11 juin 2023)

ZONE GÉOGRAPHIQUES

Lettre internationale – mai-juin 2024

FRANCE

Le 5 juin 2024, l’Assemble Nationale a définitivement adopté la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France. Plusieurs rapports parlementaires soulignant certaines fragilités du dispositif français en matière d’ingérence étrangère sont à l’origine de cette proposition de loi. Les objectifs de ce texte sont multiples. Tout d’abord, créer un registre dans lequel seront enregistrées les personnes agissant pour le compte d’un mandant étranger. Les activités visées dans ce registre sont celles qui ont pour objectifs d’influer sur la décision publique ou la conduite des politiques publiques. Le personnel diplomatique sera cependant dispensé de s’inscrire. Le texte renforce également le contrôle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique des mobilités entre le secteur privé et le secteur public en incluant le risque d’influence étrangère et ce pendant un délai de cinq ans. Le texte prévoit aussi la possibilité pour les services de renseignement d’utiliser des algorithmes pour détecter de potentielles connexions avec l’étranger. De plus, la possibilité de gels des avoirs financiers, habituellement utilisée en matière de terrorisme, pourra être mise en place. Enfin, une circonstance aggravante dans le code pénal est prévue lorsqu’une atteinte aux biens ou aux personnes est commise pour le compte d’une puissance ou d’une entité étrangère. Le texte, en cours d’examen par le Conseil Constitutionnel, est en attente de promulgation. (Vie Publique 10 juin 2024)

MONACO

Le conseil communal de la ville a annoncé, le 18 juin 2024, son intention de créer une commission de déontologie afin de prévenir les conflits d’intérêts, d’appliquer les principes déontologiques aux élus et de contrôler les déclarations de patrimoine. Le conseil communal monégasque répond ce faisant à une recommandation du GRECO. La mairie de Monaco a souligné que la mise une place d’un comité déontologique doit être effective avant 2025 selon les recommandations précitées (Monaco Matin, 20 juin 2024)

Lettre internationale – mai-juin 2024

TUNISIE

Rached Ghannouchi, le dirigeant du parti islamo-conservateur Ennahda, a été condamné à 3 ans de prison ferme pour avoir accepté des financements de l’étranger. Son gendre, Rafik Abdelassem, a également été condamné. M.Ghannouchi est en prison depuis avril 2023 pour incitation à la haine. La parti Ennahda – l’un des principaux opposants au président actuel, Kais Saied – a été condamné à une amende de 900 000 €. (Anadolou Agency, 18 mai 2024)

Lettre internationale – mai-juin 2024

GÉORGIE

Début juillet 2024, la loi sur l’influence étrangère a été définitivement adoptée au Parlement géorgien après avoir écarté le veto de la présidente pro-européenne. Selon les opposants au parti au pouvoir « Rêve géorgien », cette loi s’inspire largement d’une loi similaire adoptée en Russie en 2012. L’UE et l’OTAN ont chacune condamné l’adoption de cette loi qui oblige toutes les ONG ou médias recevant plus de 20% de financement de l’étranger à s’enregistrer en tant qu’organisation « promouvant les intérêts d’une puissance étrangère ». Cette loi est fortement critiquée car elle menace le rapprochement de la Géorgie avec l’UE alors même que 80% de la population y est favorable. (Le Monde, 28 mai 2024)

FIDJI

Le 9 mai 2024, l’ancien premier ministre fidjien, Frank Bainimarama, a été condamné à un an de prison ferme pour corruption. M. Bainimarama est resté au pouvoir entre 2006 et 2022 à la suite d’un coup d’État. Il aurait tenté d’user de son influence pour empêcher une enquête policière durant son mandat. (France info, 9 mai 2024)

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