La lettre internationale de la Haute Autorité – Novembre 2018
Alors qu’est célébrée, le 9 décembre, la journée internationale de la lutte contre la corruption, la lettre internationale de la Haute Autorité revient sur les événements, réformes et nouvelles qui ont fait l’actualité du mois de novembre 2018 en matière de prévention de la corruption et de promotion de l’intégrité. Cette actualité a été marquée par des engagements nouveaux ou renouvelés et la mise en œuvre de réformes, comme en Tunisie par exemple, mais également par les évolutions d’un certain nombre d’affaires d’atteintes à la probité ou de suspicions de conflits d’intérêts, comme en Amérique latine ou en République tchèque.
En effet, une attention croissante est apportée aux conflits d’intérêts sur l’ensemble des continents. Elle est visible tant dans des pays où leur prévention constitue une tradition profondément ancrée, comme au Canada, que dans des pays où il s’agit d’une préoccupation récente et qui s’impose comme une nouvelle priorité à l’agenda des réformes en matière de promotion de l’intégrité publique, à l’image de la Cote d’Ivoire.
Ces débats s’inscrivent dans le prolongement des discussions et des évaluations qui ont lieu au titre de la mise en œuvre des conventions internationales en matière de lutte et de prévention de la corruption. Ainsi, actuellement, les évaluations de la mise en œuvre par les États parties de la Convention des Nations Unies contre la corruption et plus spécifiquement de son chapitre II relatif à la prévention de la corruption, mais aussi le cinquième cycle d’évaluation de Groupe d’États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe, rappellent l’importance de la gestion et de la prévention des conflits d’intérêts, essentiel pour la constitution de systèmes nationaux d’intégrité robustes.
Le mois de décembre et les manifestations qui auront lieu notamment lors de la journée internationale de la lutte contre la corruption, seront de nouvelles occasions de débattre de l’évolution des cadres législatifs et réglementaires en la matière et des bonnes pratiques et outils développés à travers le monde pour mieux sensibiliser et accompagner les responsables publics et leurs institutions dans la gestion et la prévention de ces situations.
INTERNATIONAL ET MULTILATÉRAL
Le 20 novembre, Erik Solheim, le directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’environnement a été contraint de démissionner suite à des accusations de manquements éthiques. M. Solheim a été soupçonné de conflit d’intérêts et critiqué à cause de ses frais de déplacement, qui pourraient s’élever à 500 000 dollars. Selon un audit interne de l’ONU, cité par The Guardian, ces atteintes à la probité constitueraient un risque pour la réputation de l’autorité chargée de la lutte contre le changement climatique. En effet, certains États avaient annoncé qu’ils ne contribueraient plus au budget de cette agence en raison du comportement de son dirigeant.
Le 6 novembre, le Président du Groupe d’États contre la corruption (GRECO) a participé à une conférence organisée à Dubrovnik par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE). À cette occasion, il a souligné que les engagements internationaux en matière de lutte contre la corruption doivent se traduire par des actions concrètes au niveau national. Il a également rappelé que l’APCE doit donner l’exemple en se conformant aux recommandations du GRECO pour renforcer son cadre d’intégrité suite à des allégations de corruption.
Le 4 novembre, Le Taurillon a consacré un article au parquet européen. Crée en 2017, cet organe devra commencer ses activités à la fin de 2020. Il sera compétent pour mener des enquêtes et des poursuites pour fraude. Selon l’article, le nouveau parquet pourrait remédier aux insuffisances des agences existantes et serait voué à devenir un acteur important dans la lutte contre la corruption en Europe de l’Est.
Le 7 novembre, Transparency International (TI) a indiqué qu’une révision du règlement intérieur du Parlement européen, qui devrait être votée le 21 novembre, pourrait accroître la transparence du lobbying. En effet, une des dispositions à l’étude obligerait les rapporteurs, les rapporteurs fictifs et les présidents des commissions à publier leurs rencontres avec des représentants d’intérêts sur le site du Parlement. Étant donné que ces députés jouent un rôle clé dans le processus législatif, cette mesure permettrait de mieux encadrer l’influence des lobbies sur les décisions européennes. Le 21 novembre, le vote sur la révision du règlement intérieur a été reporté car le rapport des services juridiques du Parlement sur le sujet avait été distribué tardivement.
Le 12 novembre, DW a publié une analyse des activités de lobbying des acteurs non-européens à Bruxelles. Basée sur les données du registre de transparence de l’UE, cette analyse a notamment montré que les dépenses des firmes américaines représentent une part considérable des dépenses totales liées aux actions de représentation d’intérêts visant les institutions européennes. De plus, DW a mis en évidence que les activités de lobbying fluctuent sensiblement en fonction des dossiers législatifs.
Le 16 novembre, la Médiatrice européenne, Emily O’Reilly, a publié sa décision concernant le traitement par la Commission européenne des demandes d’accès à des documents sur les frais de déplacement des commissaires. Suite à une enquête, Mme O’Reilly a décidé de clore l’affaire en approuvant la politique de publication de la Commission, qui s’est engagée à rendre publiques des informations sur les frais de déplacement de chaque commissaire tous les deux mois.
Le 20 novembre, la Commission des affaires juridiques du Parlement européen a adopté le rapport portant sur le projet de directive pour une protection européenne des lanceurs d’alerte. Le texte propose des mécanismes de signalement, des mesures de protection contre les représailles et la création dans chaque État membre d’une autorité publique indépendante chargée d’accompagner les lanceurs d’alerte. Transparency International a salué le vote, considéré comme une avancée dans la bonne direction.
Le 29 novembre, un numéro de la revue Politique européenne consacré à la transparence a été publié. Les articles de cette édition ont exploré les différentes facettes des politiques de transparence mises en place par les États et les institutions en Europe. Une attention particulière a été accordée à la réglementation du lobbying.
Les 29 et 30 novembre, le Groupe de travail des hauts responsables de l’intégrité publique (SPIO) s’est réuni à l’OCDE. Les membres du SPIO ont partagé des bonnes pratiques permettant de faciliter la mise en œuvre de la Recommandation du Conseil sur l’intégrité publique, adoptée en 2017. Les échanges ont porté sur le contrôle de l’intégrité, la gestion des risques de corruption, ainsi que sur l’identification des défis et des opportunités liés au gouvernement ouvert et aux médias sociaux pour renforcer la reddition de comptes et la participation citoyenne.
Dans le dernier numéro de la Revue française de l’administration publique, mis en ligne le 22 novembre, les professeures Annie Bartoli et Cécile Blatrix ont évalué l’impact du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) en termes de transparence et de responsabilité publique à partir de l’analyse comparative des initiatives mises en œuvre aux États-Unis, au Brésil et en France. Elles ont observé que, depuis son établissement en 2011, le PGO a contribué à l’harmonisation internationale des politiques publiques nationales de transparence tout en augmentant leur visibilité. Elles ont indiqué que, malgré ses limites, le PGO a eu des effets positifs sur la responsabilité gouvernementale et qu’il semble s’inscrire dans un mouvement plus large de transformation de l’action publique au niveau mondial.
Le 16 novembre, le procureur Olivier Thormann, responsable de la division criminalité économique du ministère public de la Confédération suisse, a quitté son poste. Chargé d’enquêter sur les affaires de corruption à la FIFA, M. Thormann avait été suspendu de ses fonctions en octobre après avoir été soupçonné de violation du secret professionnel, d’entrave à l’action pénale, d’octroi d’un avantage et de corruption passive. Toutefois, la procédure visant à clarifier ces allégations a été classée.
Le 20 novembre, Sundra Rajoo, vice-président malaisien de la chambre de jugement de la commission d’éthique de la FIFA, a été arrêté par la Commission anti-corruption de Malaisie. Il est soupçonné d’avoir utilisé sa position pour obtenir des avantages financiers. M. Rajoo a été suspendu de ses fonctions par la FIFA. Par ailleurs, il a démissionné de son poste de directeur du centre international asiatique d’arbitrage.
Le 18 novembre, les lauréats du prix de l’innovation politique, dont le jury est composé de citoyens européens, ont été annoncés. Dans la catégorie « démocratie », un projet de l’Assemblée nationale française a été récompensé. L’Assemblée a lancé au début de 2018 une plateforme de consultation en ligne afin de renforcer la participation citoyenne dans le travail parlementaire. Depuis son lancement, 10 consultations ont été organisées, réunissant près de 150 000 contributions de 13 475 citoyens.
À l’occasion du sommet du G20, qui s’est tenu les 30 novembre et 1er décembre à Buenos Aires, l’ONG Transparency International (TI) et sa section locale ont mené une campagne de sensibilisation. Des affiches avec le slogan « #G20Agissez : Mettez en œuvre vos engagements anti-corruption » ont été placardées dans les rues de la capitale argentine. Cette action visait à placer la lutte contre la corruption au cœur de la rencontre en appelant les chefs d’État à appliquer des mesures concrètes dans ce domaine.
ZONES GÉOGRAPHIQUES
Le 2 novembre, la BBC a rapporté que le président Cyril Ramaphosa s’est engagé à faire de la lutte contre la corruption une priorité. Il aurait notamment critiqué le gouvernement de son prédécesseur, Jacob Zuma, dont il était le vice-président.
Le 19 novembre, Pravin Gordhan, un ancien ministre des Finances qui avait été limogé par M. Zuma, a témoigné devant la commission d’enquête sur les affaires de corruption impliquant l’ex-président et les Gupta, une famille d’hommes d’affaires d’origine indienne. M. Gordhan a évoqué des nominations suspectes à la tête de sociétés d’État et a accusé M. Zuma d’avoir installé un climat d’impunité favorable à la corruption.
Le 28 novembre, le parquet sud-africain a annoncé l’abandon provisoire des charges à l’encontre de certains alliés de M. Zuma, dont un membre de la famille Gupta, en raison de la lenteur de la coopération judiciaires avec l’Inde. Ces personnes sont soupçonnées de détournement de fonds publics. Cependant, selon le parquet, elles n’ont pas pu être inculpées car des informations nécessaires à l’enquête n’ont pas encore été communiquées par les autorités indiennes.
ANGOLA
Le 22 novembre, lors d’une visite à Lisbonne, le président Joao Lourenço a réaffirmé sa détermination à lutter contre la corruption et à œuvrer pour le recouvrement des fonds publics détournés pendant le précédent gouvernement. Cet engagement a suscité des inquiétudes au Portugal car l’ancienne métropole a bénéficié d’importants investissements angolais.
CÔTE D’IVOIRE
Le 3 novembre, la Haute Autorité pour la bonne gouvernance (HABG) a organisé un séminaire à destination des membres des comités locaux d’intégrité, des organes chargés de prévenir et de combattre la corruption dans les différentes régions du pays. La formation visait à améliorer les capacités opérationnelles de ces comités pour qu’ils puissent assurer pleinement leurs missions.
GUINÉE
Le 2 novembre, les textes d’application de la loi sur la prévention, la détection et la répression de la corruption ont été validés après un atelier de trois jours réunissant plusieurs acteurs engagés dans la lutte contre la corruption en Guinée. Des magistrats, des représentants des forces de l’ordre et des membres de la société civile ont échangé sur la mise en œuvre de la loi. Ils ont abordé notamment les déclarations de patrimoine des responsables publics, les procédures de réception des plaintes et la protection des lanceurs d’alertes. Ces discussions ont permis de préciser le cadre d’intégrité guinéen.
NIGERIA
Le 19 novembre, deux anciens gouverneurs ont été condamnés à 10 et 12 ans de prison pour corruption dans le cadre d’un procès en appel. Les deux ont été reconnus coupables de détournement de fonds publics.
Le 26 novembre, la BBC a indiqué qu’un tribunal de Milan envisage d’inculper les groupes Eni et Shell pour des faits de corruption dans le cadre d’un accord pétrolier controversé qui aurait fait perdre au Nigeria environ 6 milliards de dollars. Les compagnies sont soupçonnées d’avoir versé des pots-de-vin à des responsables publics nigérians pour acquérir les droits d’exploitation pétrolière. L’ONG Global Witness a estimé que cet accord a privé l’État nigérian du double de son budget annuel dédié à l’éducation et à la santé.
ZIMBABWE
Le 8 novembre, des poursuites ont été engagées contre deux anciens ministres de l’ex-président Robert Mugabe. Un ex-ministre est soupçonné de corruption en lien avec l’attribution d’un marché public à une entreprise chinoise, alors que l’autre est accusé d’avoir accordé des faveurs illégales à la sœur de l’ancienne première dame. En effet, de nombreux proches de M. Mugabe ont fait l’objet d’enquêtes pour corruption.
Le 8 novembre, la police a affirmé posséder des preuves de l’implication de David Shimron, l’avocat du Premier ministre Benyamin Netanyahou, dans une affaire de corruption et de blanchiment d’argent. Le dossier porte sur des soupçons de corruption autour de l’achat de sous-marins militaires du groupe allemand ThyssenKrupp. L’ex-chef de cabinet de M. Netanyahou et l’ancien commandant de la marine sont également visés par cette enquête. Le procureur général devrait désormais décider de la mise en examen des suspects.
TUNISIE
La première édition des Rencontres internationales du film anti-corruption (RIFAC) s’est tenue du 29 octobre au 1er novembre en Tunisie. Organisé par l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) en partenariat avec l’agence sud-coréenne de coopération internationale (KOICA), ce festival avait pour objectif de sensibiliser le grand public aux enjeux de la lutte contre la corruption par le biais du cinéma.
Le 7 novembre, Business News est revenu sur les principales dispositions de la loi sur la déclaration de patrimoine, la lutte contre l’enrichissement illicite et les conflits d’intérêts dans le secteur public, adoptée en juillet. En vertu de la nouvelle loi, plus de 350 mille personnes devront transmettre des déclarations à l’INLUCC. Ces déclarations obligatoires serviront à prévenir, détecter et combattre des atteintes à la probité.
Le 20 novembre, l’INLUCC a publié la liste des personnes ayant déclaré leur patrimoine et leurs intérêts depuis le 16 octobre. Au 19 novembre, 1425 déclarations avaient été reçues. Seulement 0,5% des personnes concernées par le dispositif ont respecté leurs obligations déclaratives.
Le 23 novembre, l’INLUCC a appelé les présidents d’associations, des partis politiques et des structures mentionnées dans la loi à lui fournir la liste des personnes soumises aux obligations de déclaration pour les enregistrer sur sa base de données. Une adresse électronique a été mise à la disposition de ces responsables à cet effet.
Le 24 novembre, le président Béji Caïd Essebsi a déposé sa déclaration de patrimoine et d’intérêts auprès de l’INLUCC, devenant ainsi le premier chef d’État tunisien à avoir suivi cette démarche.
Le 19 novembre, l’agenda de Valérie Plante, la maire de Montréal, a été rendu public afin d’accroître la transparence de son administration. Dorénavant, les activités publiques de la maire seront consultables en ligne.
Le 20 novembre, Ariane Mignolet, la Commissaire à l’éthique et à la déontologie de l’Assemblée nationale du Québec, a ouvert une enquête sur les manquements éthiques présumés de Pierre Fitzgibbon, député et ministre de l’Économie et de l’Innovation. M. Fitzgibbon est soupçonné d’avoir favorisé les intérêts financiers d’une entreprise dont il était actionnaire. Il a nié les allégations et a assuré qu’il ne s’était pas placé en situation de conflit d’intérêts.
Le 27 novembre, Mme Mignolet a ouvert une enquête au sujet de la députée Marie-Louise Tardif pour non-respect du Code d’éthique et de déontologie des membres de l’Assemblée nationale québécoise. Mme Tardif a notamment été accusée d’avoir enfreint des dispositions concernant l’incompatibilité entre un mandat parlementaire et des activités secondaires rémunérées.
Le 28 novembre, Radio-Canada est revenu sur une réforme proposée par le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford. Le gouvernement de la province a souhaité que des hauts fonctionnaires indépendants, comme la vérificatrice générale ou l’ombudsman, puissent être embauchés, renvoyés ou suspendus par l’Assemblée législative. Cette mesure a été critiquée car, selon l’opposition, elle pourrait menacer l’indépendance de ces fonctionnaires.
ÉTATS-UNIS
Le 5 novembre, l’association Citizens for Responsibility and Ethics in Washington (CREW) a indiqué qu’Ivanka Trump, la fille et conseillère du président Donald Trump, continue à avoir des intérêts commerciaux en Chine malgré la fermeture de sa marque de mode. D’après CREW, ces intérêts pourraient interférer avec son travail à la Maison-Blanche et sembleraient mettre en doute l’exercice impartial de sa fonction.
Le 7 novembre, Transparency International a appelé les autorités américaines, et notamment le procureur général par intérim Matthew Whitaker, à défendre l’indépendance de l’enquête menée par le procureur spécial Robert Mueller sur l’ingérence russe dans l’élection présidentielle. M. Whitaker s’était en effet montré critique à l’égard de cette enquête. L’ONG a souligné que toute tentative d’influer sur des enquêtes visant le chef d’État était une source de préoccupation.
Le 16 novembre, le think tank Brookings Institution a consacré un article au retrait des États-Unis de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), il y a un an. L’article a noté que, malgré cette décision jugée regrettable, d’autres acteurs américains, comme des organisations de la société civile ou des parlementaires, poursuivent leurs efforts pour renforcer la transparence et la responsabilité dans la gouvernance des ressources naturelles.
Le 20 novembre, CREW a constaté que la déclaration d’intérêts financiers de M. Whitaker avait été modifiée à plusieurs reprises. De ce fait, l’association a déposé une demande auprès du département de la Justice pour avoir accès aux versions antérieures de la déclaration, ainsi qu’à la liste des agents qui ont examiné et approuvé le formulaire. Selon CREW, cette déclaration est essentielle pour contrôler les conflits d’intérêts potentiels du procureur général par intérim. Par ailleurs, d’autres organisations de la société civile ont détecté des zones d’ombre dans la déclaration de M. Whitaker, comme le manque de transparence des dons collectés par une fondation qu’il dirigeait.
Le 29 novembre, Michael Cohen, l’ancien avocat de M. Trump, a plaidé coupable pour avoir menti au Congrès sur les relations d’affaires entre le président et la Russie. En particulier, M. Cohen a indiqué avoir menti à propos d’un projet immobilier de l’organisation Trump à Moscou. Il avait initialement affirmé que ce projet avait été abandonné au début de l’année 2016. Désormais, M. Cohen reconnait que les discussions sur le projet et les contacts avec des responsables russes s’étaient poursuivis jusqu’en juin 2016, après la désignation de M. Trump comme candidat républicain à la présidentielle. Le président a contesté la déclaration de son ex-avocat.
MEXIQUE
Le 13 novembre, lors de l’ouverture du procès de Joaquín Guzmán, alias « El Chapo », un puissant narcotrafiquant mexicain, le président sortant Enrique Peña Nieto, ainsi que son prédécesseur Felipe Calderón, ont été accusés d’avoir reçu des pots-de-vin d’un cartel de la drogue. L’avocat de M. Guzmán a indiqué que plusieurs centaines de millions de dollars auraient été transférés aux deux chefs d’État. Ces derniers ont rejeté les allégations. D’autres responsables publics, comme un ancien secrétaire à la Sécurité publique, ont également été accusés de corruption en lien avec le crime organisé.
BRÉSIL
Le 1er novembre, le juge Sérgio Moro a accepté le poste de ministre de la Justice et de la Sécurité publique proposé par le président élu Jair Bolsonaro. M. Moro a accédé à la notoriété grâce à son rôle prépondérant dans l’opération « Lava Jato » (lavage express), une vaste enquête pour corruption visant des hauts responsables publics. En particulier, le magistrat a condamné l’ex-président Luiz Inácio Lula da Silva, dit Lula, actuellement en prison, pour corruption et blanchiment d’argent. L’entrée de M. Moro au futur gouvernement est controversée. Approuvée par une partie de l’opinion publique, elle a également alimenté des soupçons de partialité et de politisation de la justice.
Le 19 novembre, un juge a accepté la plainte déposée en septembre à l’encontre de Fernando Haddad, l’ancien candidat du Parti des travailleurs à la présidentielle, par le parquet de São Paulo. Comme son mentor Lula avant lui, M. Haddad sera poursuivi pour corruption. Il est soupçonné d’avoir reçu illégalement près de 1 million d’euros de la part d’une entreprise de BTP afin de rembourser une dette contractée pendant sa campagne municipale en 2012.
Le 26 novembre, Lula a été accusé de blanchiment d’argent. Selon le parquet de São Paulo, l’ancien chef d’État aurait intercédé auprès du président de Guinée équatoriale pour favoriser les affaires d’une entreprise brésilienne dans le pays africain. En échange, il aurait reçu des pots-de-vin sous forme de dons à l’Institut Lula, une fondation sans but lucratif.
Le 29 novembre, le gouverneur de l’État de Rio de Janeiro, Luiz Fernando Pezão a été arrêté dans le cadre de l’opération « Lava Jato ». Il est accusé d’avoir reçu environ 9 millions d’euros de pots-de-vin. Depuis 1998, les quatre derniers gouverneurs de Rio ont été emprisonnés pour corruption, Pezão est néanmoins le premier à avoir été arrêté pendant l’exercice de son mandat.
COLOMBIE
Le 13 novembre, le bureau du procureur général a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les décès de Jorge Enrique Pizano, un témoin clé dans l’affaire Odebrecht, et son fils. Le groupe de BTP brésilien Odebrecht est au cœur du plus grand scandale de corruption d’Amérique latine. En Colombie, l’entreprise est soupçonnée d’avoir payé plusieurs millions d’euros en pots-de-vin et financé des campagnes électorales en vue de remporter des contrats publics.
M. Pizano, qui affirmait détenir des informations essentielles sur l’affaire, est mort le 8 novembre. Les médecins légistes ont initialement attribué son décès à un infarctus. Trois jours plus tard, le fils de M. Pizano a été empoisonné au cyanure en buvant de l’eau d’une bouteille qui se trouvait sur le bureau de son père. L’enquête vise à déterminer l’origine du poison.
Le 15 novembre, Bloomberg a révélé que M. Pizano était en train de négocier un accord avec les autorités américaines afin d’obtenir l’asile en échange des documents en sa possession. L’ambassade américaine à Bogota et le FBI ont refusé de commenter cette information.
PÉROU
Le 31 octobre, Keiko Fujimori, dirigeante de l’opposition et fille de l’ex-président Alberto Fujimori, a été placée en détention préventive pour une durée de 36 mois en raison d’un danger élevé de fuite. Mme Fujimori est accusée d’avoir reçu des fonds illégaux du conglomérat brésilien Odebrecht.
Le 18 novembre, l’ancien président Alan Garcia a demandé asile à l’ambassade d’Uruguay à Lima après avoir été interdit de sortie du territoire dans le cadre d’une enquête pour corruption. M. Garcia est soupçonné d’avoir reçu des pots-de-vin du groupe Odebrecht à l’occasion de la construction d’une ligne de métro dans la capitale péruvienne. L’ex-chef d’État s’est dit victime d’une persécution politique.
VENEZUELA
Le 27 novembre, Alejandro Andrade Cedeno, ancien dirigeant de l’Office national du Trésor sous le gouvernement d’Hugo Chavez, a été condamné aux États-Unis à dix ans de prison pour corruption. M. Cedeno a plaidé coupable d’avoir utilisé sa fonction pour recevoir des pots-de-vin de la part de personnes cherchant à obtenir des devises étrangères à des taux favorables.
Le 30 novembre, Yao Jinqi, un ancien responsable public, a été extradé en Chine depuis la Bulgarie. Accusé d’avoir reçu des pots-de-vin, M. Yao aurait fui son pays en 2005. Selon l’agence de presse Xinhua, il s’agirait de la première extradition d’un fonctionnaire chinois soupçonné de corruption depuis un État membre de l’Union européenne.
Le même jour, Xinhua a rapporté que Meng Hongwei, l’ex-président d’Interpol visé par une enquête pour corruption, a été expulsé de l’assemblée consultative du gouvernement chinois. L’épouse de M. Meng a affirmé que son mari était la cible d’une persécution politique.
MALAISIE
Le 1er novembre, la justice américaine a annoncé l’inculpation de deux anciens banquiers de Goldman Sachs et d’un financier malaisien dans l’enquête pour blanchiment des 4,5 milliards de dollars détournés du fonds souverain malaisien 1MDB. Les ex-cadres de la banque d’affaires ont également été accusés d’avoir versé des pots-de-vin à des responsables publics malaisiens pour qu’ils choisissent Goldman Sachs comme banque conseil.
Le 13 novembre, le Premier ministre malaisien, Mahathir Mohamad, a accusé des banquiers de Goldman Sachs d’avoir “trompé” son pays dans le cadre de transactions avec le fonds 1MDB. Il a ajouté que les autorités américaines avaient promis d’aider Kuala Lumpur à récupérer les commissions perçues par la banque d’affaires grâce à 1MDB.
Au cours du mois de novembre, les actions de Goldman Sachs ont chuté en raison de son implication dans le scandale de corruption 1MDB.
PHILIPPINES
Le 9 novembre, Imelda Marcos, parlementaire et veuve de l’ancien dictateur Ferdinand Marcos, a été condamnée à plusieurs décennies de prison pour corruption. Agée de 89 ans, il est cependant peu probable qu’elle purge sa peine car elle dispose encore de recours. Mme Marcos est accusée d’avoir créé des fondations en Suisse pour dissimuler son enrichissement illicite. En effet, son défunt mari et son entourage sont soupçonnés par les autorités philippines d’avoir détourné 10 milliards de dollars des caisses publiques.
OUZBÉKISTAN
Le 22 novembre, un atelier sur la déontologie des responsables publics a été organisé par des autorités ouzbeks, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Réunissant près de 300 enquêteurs et procureurs de toutes les régions de l’Ouzbékistan, l’atelier a abordé la déclaration de patrimoine, l’encadrement de l’acceptation de cadeaux, la prévention des conflits d’intérêts et l’intégrité dans la fonction publique.
Le 29 novembre, six locaux de la Deutsche Bank, dont son siège à Francfort, ont été perquisitionnés dans le cadre d’une enquête pour blanchiment d’argent. Suite aux révélations des « Panama Papers », une fuite de documents portant sur des sociétés offshore, la banque est soupçonnée d’avoir aidé ses clients à créer des firmes dans des paradis fiscaux pour blanchir des capitaux issus d’infractions pénales. La perquisition a été menée par 170 magistrats, policiers et agents des services fiscaux.
DANEMARK
Le 19 novembre, Howard Wilkinson, le lanceur d’alerte du scandale de blanchiment d’argent à la Danske Bank, a été auditionné par le parlement danois. Il a affirmé que d’autres banques étaient impliquées dans les 200 milliards d’euros de transactions suspectes ayant transité via la filiale estonienne de la banque danoise, depuis les comptes de non-résidents, entre 2007 et 2015. M. Wilkinson a notamment mentionné la filiale américaine d’une banque européenne. Bien que la Deutsche Bank n’ait pas été citée, des soupçons pèsent sur la banque allemande car elle a été la principale banque correspondante de la Danske Bank en Estonie pour des opérations en dollar jusqu’en 2015. Au cours de son audition, M. Wilkinson a également critiqué l’inaction des régulateurs.
MACÉDOINE
Le 20 novembre, Transparency International, et ses sections en Macédoine et en Hongrie, ont exhorté les autorités hongroises à extrader l’ancien Premier ministre Nikola Gruevski, condamné à deux ans de prison pour corruption. M. Gruevski est actuellement Hongrie, où il demande l’asile politique.
MALTE
Le 16 novembre, lors de l’examen périodique universel, un mécanisme qui évalue les réalisations des États membres de l’ONU dans le domaine des droits de l’homme, le gouvernement maltais a été appelé à améliorer la protection des journalistes. Cette recommandation est intervenue après le meurtre de la journaliste anti-corruption Daphne Caruana Galizia, un crime qui avait exposé les défaillances de l’État de droit dans le pays.
Le 18 novembre, le Times of Malta a rapporté que les enquêteurs auraient identifié des personnes soupçonnés d’avoir planifié l’assassinat de Mme Caruana Galizia. Ils auraient également assuré que l’enquête se trouvait à un stade avancé, sans pour autant fournir des informations précises sur les auteurs présumés de l’attentat à la voiture piégée.
RÉPUBLIQUE TCHÈQUE
Le 23 novembre, le gouvernement du Premier ministre Andrej Babiš a survécu à une motion de censure, déposée par l’opposition à la suite d’allégations concernant son fils et une affaire de fraude. Mis en examen depuis 2017 pour un détournement de fonds européens présumé, M. Babiš a été accusé d’avoir envoyé son fils en Crimée, annexée par la Russie, pour l’écarter de l’enquête sur cette affaire. Le chef du gouvernement a nié les accusations.
Le 8 novembre, le Parquet anticorruption (DNA) a annoncé l’ouverture d’une enquête visant le président du Sénat, Calin Popescu-Tariceanu. Ce dernier est soupçonné d’avoir reçu des pots-de-vin lors de l’achat de licences Microsoft lorsqu’il était à la tête du gouvernement en 2008.
Le 13 novembre, dans le cadre de la réforme judicaire entreprise en Roumanie, la Commission européenne a déploré un recul en matière de lutte contre la corruption et d’indépendance de la justice. Dans une résolution adoptée le même jour, le Parlement européen a critiqué cette réforme. En effet, Bruxelles s’inquiète des menaces contre l’État de droit en Roumaine, alors que le pays s’apprête à assumer la présidence tournante de l’Union européenne en janvier.
SUISSE
Le 8 novembre, Mauro Poggia, conseiller d’État genevois, a souligné que la transparence et le contrôle des dépenses des conseillers administratifs de la Ville de Genève doivent être renforcés. Dans ce contexte, M. Poggia s’est engagé à publier ses notes de frais pour les années 2017 et 2018.
UKRAINE
Le 4 novembre, Kateryna Gandziouk, une militante anti-corruption qui dénonçait les malversations de la police, est décédée. Le 31 juillet, un inconnu avait aspergé Mme Gandziouk d’un litre d’acide sulfurique. Après trois mois d’hospitalisation et onze opérations, elle a succombé suite à accident vasculaire. Cette attaque a particulièrement alarmé les membres de la société civile, qui font l’objet d’intimidations en Ukraine.
Le 23 novembre, France 24 a consacré une émission au bilan de la révolte du Maïdan en 2013. Cinq ans après les manifestations qui réclamaient un rapprochement avec l’UE et une meilleure gouvernance du pays, de nombreux Ukrainiens sont déçus car aucun dirigeant n’a été condamné pour corruption. Néanmoins, certains militants restent optimistes et soulignent qu’un grand nombre de réformes ont été adoptées grâce à leur pression.
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