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Déclarations d’intérêts des élus : « Cela permet de dissiper les fantasmes »

Entretien accordé par Jean-Louis Nadal à l’hebdomadaire L’Express

Par Adrien Sénécat, publié le 24/07/2014

L’Express – La Haute autorité pour la transparence de la vie publique publie ce jeudi les déclarations des députés et des sénateurs. « Des informations objectives sur ceux qui nous gouvernent », juge son président Jean-Louis Nadal. Interview. 

Jean-Louis Nadal – Après les ministres, au tour des députés et des sénateurs. La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) publie ce jeudi les déclarations d’intérêts et d’activités des parlementaires sur son site Internet. Jean-Louis Nadal, président de la HATVP et ex-procureur général auprès de la Cour de cassation, s’en félicite. Interview.

Qu’apporte la publication des déclarations d’intérêts des parlementaires? 

C’est la loi sur la transparence, votée l’année dernière, qui a prévu cette publication qui existe déjà dans de nombreux pays d’Europe. C’est le cas depuis des années, le Royaume-Uni le fait depuis 1974 par exemple, ou encore au Parlement européen qui vient de mettre en ligne les déclarations des eurodéputés.

En prévoyant cette publication, le législateur national a voulu que les liens d’intérêts soient connus afin que les conflits d’intérêts soient mieux prévenus. Il existe parfois une confusion entre les notions de lien d’intérêts et de conflit d’intérêts, or tout lien d’intérêts ne constituent pas forcément un conflit d’intérêts.

Comme tout un chacun, les responsables publics possèdent des liens d’intérêts. Nous avons tous des liens d’intérêts, professionnels, personnels ou familiaux qui sont inhérents aux relations sociales. Je dis souvent que sans liens d’intérêts, on est souvent sans intérêt!

Les déclarations sont parfois peu remplies. De quelle marge de manœuvre la Haute Autorité dispose-t-elle pour les vérifier? 

S’il s’avère qu’une personne a omis de déclarer des intérêts importants, la loi a prévu que la Haute Autorité puisse saisir le procureur de la République. Même si le principe de séparation des pouvoirs empêche la Haute Autorité d’enjoindre à un parlementaire de faire cesser un conflit d’intérêts, elle peut saisir le bureau de l’Assemblée nationale ou du Sénat qui sont alors compétents. Je crois pouvoir dire que nous exerçons nos missions avec indépendance et exigence.

Certains députés et sénateurs ont dénoncé ce qu’ils qualifient de voyeurisme. Où s’arrête la transparence selon vous? 

Encore une fois, cette publication, qui avait été l’une des propositions de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par Lionel Jospin, en 2012, est largement pratiquée en Europe. Le GRECO, issu du Conseil de l’Europe, a même rendu en janvier 2014 un rapport d’évaluation de la France dans lequel il se félicite de notre dispositif.

Bien sûr, cela peut être vécu par les élus comme une marque d’inquisition ou de défiance, mais c’est essentiel, c’est la loi! La transparence est aujourd’hui un thème, une notion qui se retrouve dans de très nombreuses dimensions du droit comme de la vie sociale. Lorsqu’elle est organisée, elle peut permettre de dissiper les fantasmes et fournir des informations objectives sur ceux qui nous gouvernent.

Ce mouvement de fond participe à faire des citoyens mieux informés, plus interrogatifs peut-être, mais qui peuvent, s’ils le souhaitent, mieux exercer leurs droits. La transparence doit se faire dans le respect de la vie privée, c’est un principe auquel je suis particulièrement attaché. Elle doit être proportionnée au but d’intérêt général recherché. Le nom du conjoint ou l’adresse des maisons qui figurent dans les déclarations ne sont par exemple pas rendus publics.

Parmi les activités annexes déclarées, on observe qu’un certain nombre de parlementaires mentionnent des activités d’avocat d’affaires très rémunératrice. N’y a-t-il pas un risque de conflit d’intérêts? 

Il faut rappeler que dans la grande majorité des cas, les parlementaires n’exercent que des fonctions électives. Un peu plus de 10% d’entre eux exercent une activité rémunérée dans le secteur privé en parallèle de leur mandat, ce que la loi autorise par ailleurs.

Parmi eux, environ 40 mentionnent une activité d’avocat et nombreux sont ceux qui ont pris les mesures nécessaires en s’omettant du barreau ou en limitant leur activité. Une infime minorité entre dans la catégorie que vous évoquez et relève le cas échéant des organes de déontologie parlementaires et professionnels.

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