Mise à jour du 15 septembre 2022
À la suite d’échanges avec des représentants d’intérêts inscrits au répertoire, la Haute Autorité a mis à jour le présent article, initialement publié le 9 mai 2022, pour tenir compte des actions d’influence menées après l’adoption de la loi AGEC, d’une part, et en élargissant l’analyse aux fiches d’activités qui ne citaient pas expressément la loi AGEC dans leur objet, d’autre part.
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi AGEC », est l’un des textes de loi phares de l’actuelle législature. Elle a pour ambition de sortir de la logique du tout-jetable en impulsant la transition d’une économie linéaire et productiviste vers une économie dite circulaire, favorisant le réemploi, la réparation et le recyclage des produits au service de l’économie verte.
Cette loi se structure autour d’enjeux stratégiques majeurs, économiques, sociétaux, environnementaux et sanitaires. En effet, la loi AGEC vise la réduction globale des déchets à travers l’amélioration des dispositifs de collecte, la lutte contre le gaspillage grâce au réemploi solidaire, la lutte contre l’obsolescence programmée et contre les dépôts sauvages de déchets.
Cette décision publique a donc cristallisé de nombreux débats qui ont fait émerger les différentes parties prenantes, parmi lesquelles des acteurs industriels, des acteurs de la filière recyclage et de la gestion des déchets et des associations environnementales.
Les déclarations de 264 entités inscrites au répertoire des représentants d’intérêts reflètent une intense activité de lobbying, de la part de sociétés commerciales et de cabinets de lobbying, mais aussi d’organisations professionnelles, de syndicats ou d’associations, évoluant dans les secteurs de l’agroalimentaire, des services à l’environnement, du commerce et de la protection de l’environnement. 1 363 fiches d’activités publiées témoignent du nombre d’actions menées et révèlent les positions défendues par chacun des acteurs, ainsi que les moyens qu’ils y ont consacrés.
Contexte et enjeux de la loi AGEC
Le calendrier législatif
La loi AGEC est issue de la mise en œuvre combinée des propositions issues de la feuille de route de l’économie circulaire (FREC), lancée le 24 octobre 2017 et ayant conduit à la publication, le 23 avril 2018 de « 50 mesures pour une économie 100 % circulaire », et de celles résultant de la transposition, en droit français, des directives européennes du « paquet économie circulaire », respectivement publiées les 23 avril et 14 juin 2018. Il est intéressant de noter qu’à l’occasion du Grand débat national, parmi les 150 000 contributions citoyennes recueillies sur le thème de la transition écologique, 70 000 d’entre elles dénonçaient une défaillance du système de collecte des déchets en France.
Le ministre de la transition écologique et solidaire de l’époque, François de Rugy, et la secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, Brune Poirson, ont présenté le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire le 10 juillet 2019 en conseil des ministres. Le Gouvernement a fait le choix d’engager la procédure accélérée d’examen du texte.
Après l’adoption en première lecture par le Sénat du projet de loi, le 27 septembre 2019, le texte a été débattu et adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 19 décembre 2019. À l’issue de la navette parlementaire, faute d’un accord commun entre les deux assemblées, une commission mixte paritaire a été convoquée et a débouché sur un accord intervenu le 8 janvier 2020. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a été adoptée le 30 janvier 2020, avant d’être promulguée le 10 février 2020.
L’application de la loi impose souvent la rédaction de mesures réglementaires visant à rendre les textes applicables. À ce titre, 52 décrets d’application ont été publiés de juin 2020 à avril 2022. En outre, l’ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets, a été adoptée.
Le contenu de la loi
La loi AGEC comprend dans sa version définitive 130 articles répartis en six titres.
Le titre I énumère les objectifs et les moyens pour parvenir à la réduction globale du volume de déchets produits. Des objectifs de politiques publiques en matière de réduction des déchets plastiques sont fixés afin de tendre vers la neutralité carbone. L’article 7 prévoit la fin de la mise sur le marché d’emballages en plastique à usage unique en 2040, en suivant une stratégie « 3R » (« réduction, réutilisation et recyclage »), l’une des mesures phares de la loi.
Le titre II vise à améliorer les dispositifs d’information du consommateur portant sur les caractéristiques environnementales des produits vendus pour favoriser leur réparation et leur réemploi. Le but est notamment de renforcer la lutte contre l’obsolescence programmée des équipements électroniques grâce à l’introduction d’indices de durabilité et de réparabilité (article 16)
Le titre III prévoit de nombreuses mesures donnant la priorité au réemploi solidaire et à la réutilisation dans le cadre de la stratégie de lutte contre le gaspillage, comme par exemple l’interdiction de la destruction des invendus non-alimentaires (article 35). Le législateur ouvre également la voie à la signature de conventions de dons de denrées alimentaires pour lutter contre le gaspillage dans le secteur agroalimentaire.
Le titre IV relatif à la « responsabilité des producteurs » renforce la portée du principe pollueur-payeur pour responsabiliser les fabricants de produits. Une dizaine de nouvelles filières, reposant sur le principe de responsabilité élargie du producteur (REP), sont créées.
Le titre V renforce les prérogatives des maires en matière de lutte contre les dépôts illégaux de déchets, pour prévenir les dépôts sauvages issus de la filière du bâtiment notamment.
Enfin, le titre VI énumère certaines mesures, notamment en matière de valorisation énergétique des déchets, de traitement des biodéchets et de traitement des déchets d’amiante.
Certaines dispositions de la loi, comme l’interdiction de détruire des invendus non-alimentaires, l’utilisation de vaisselle réemployable pour la livraison de repas quotidiens à domicile ou le renforcement de l’information des consommateurs sur les gestes de tri et les caractéristiques environnementales des produits, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2022.
Les représentants d’intérêts actifs autour de la loi AGEC
Parmi les représentants d’intérêts inscrits au répertoire, 264 ont déclaré des activités de lobbying destinées à influencer l’élaboration de la loi AGEC et/ou son application.
* Autres : Eco-organisme, Société d’assurance mutuelle, EPIC, Fondation
Les types d’actions que ces représentants d’intérêts ont menées se répartissent ainsi :
Les responsables publics visés par les actions de représentation d’intérêts
La problématique de la réduction des déchets et de la lutte contre le gaspillage en France revêt un caractère transversal et stratégique qui fait intervenir plusieurs ministères et administrations. Les déclarations des représentants d’intérêts montrent que six catégories de responsables publics ont fait l’objet d’entrées en communication : les membres du Gouvernement ou de cabinet ministériel, les collaborateurs du Président de la République, les membres des assemblées parlementaires, les personnes titulaires d’un emploi à la décision du Gouvernement et les membres d’une autorité administrative indépendante.
Les membres du Gouvernement, de cabinets ministériels et les collaborateurs du Président
Au classement des responsables publics les plus cités viennent en première position les membres du Gouvernement et de cabinets ministériels ainsi que les collaborateurs du Président de la République, avec 2 009 occurrences.
Une quinzaine de ministères ont été approchés, ainsi que Matignon. D’après les déclarations des représentants d’intérêts, le ministère de la transition écologique et solidaire apparaît, avec 819 occurrences, comme le plus sollicité. Viennent ensuite le ministère de l’économie et des finances (366 occurrences), Matignon (314 occurrences), puis le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (95 occurrences).
Les collaborateurs du Président de la République sont cités 228 fois.
La Fédération française des tuiles et briques (FFTB), dans l’une de ses fiches d’activités, donne des précisions sur le responsable public rencontré.