Le contrôle de la mobilité public/privé
Le contrôle de la reconversion professionnelle des anciens ministres, Présidents d’exécutifs locaux et membres d’une AAI/API (art. 23 de la loi 2013-907 relative à la transparence de la vie publique)
Des avis qui lient l’ancien responsable public
Pendant une durée de trois ans, toute personne qui a occupé l’une de ces fonctions doit saisir la Haute Autorité afin qu’elle examine si les nouvelles activités privées qu’elle envisage d’exercer sont compatibles avec ses anciennes fonctions. Sont concernées les activités libérales (par exemple l’exercice de la profession d’avocat) ou les activités privées rémunérées au sein d’une entreprise publique ou privée (activité salariée, création d’une société, etc.) ainsi que celles exercées au sein d’un établissement public à caractère industriel et commercial ou au sein d’un groupement d’intérêt public à caractère industriel et commercial.
La Haute Autorité vérifie si l’activité envisagée pose des difficultés de nature pénale ou déontologique. Lorsqu’elle identifie de telles difficultés, elle peut rendre un avis d’incompatibilité, qui empêche la personne d’exercer l’activité envisagée, ou de compatibilité avec réserves, dans lequel elle impose des mesures de précaution de nature à prévenir le risque pénal et déontologique. Depuis la promulgation de la loi n° 2024-850 du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France, la Haute Autorité examine aussi le risque d’influence étrangère. Lorsqu’il est effectué au regard de ce risque, le délai du contrôle est étendu à cinq ans, ce qui signifie que la Haute Autorité examine à ce titre les activités exercées au cours des cinq années précédant le projet de mobilité du responsable public concerné et pendant les cinq années suivant la fin de ses fonctions publiques.
La loi prévoit que la Haute Autorité peut rendre publics les avis qu’elle accorde après avoir recueilli les observations de la personne concernée et avoir retiré les mentions qui portent atteinte à un secret protégé par la loi.
Le contrôle opéré par la Haute Autorité
Lorsqu’elle est saisie par un ancien responsable public, la Haute Autorité se livre à un double contrôle. D’abord, elle recherche si l’activité envisagée n’expose pas la personne concernée à un risque pénal. En effet, l’article 432-13 du code pénal interdit à un ancien responsable public de travailler, au sens large, pour une entreprise qui était soumise à son pouvoir de surveillance ou de contrôle lorsqu’il exerçait des fonctions publiques, avec laquelle il a conclu des contrats ou à l’égard de laquelle il a pris ou proposé des décisions. Si la Haute Autorité considère que l’activité envisagée conduirait nécessairement l’ancien responsable public à commettre ce délit, elle peut prononcer un avis d’incompatibilité et l’activité ne peut pas être exercée. S’il existe un risque pénal mais que ce risque peut être évité par la mise en œuvre de certaines précautions, la Haute Autorité rend un avis de compatibilité en formulant les réserves qui s’imposent : par exemple, lorsqu’elle est saisie de la création d’une société de conseil, elle va demander de ne pas prendre pour clientes des sociétés avec lesquelles l’intéressé a conclu des contrats lorsqu’il était en fonctions ou à l’égard desquelles il a pris des décisions.
Sur le plan déontologique, la Haute Autorité s’assure d’abord que l’activité envisagée ne porte pas atteinte à la dignité, à la probité et à l’intégrité des fonctions antérieures. Ensuite, le contrôle porte sur l’obligation de prévention des conflits d’intérêts : le fait d’exercer cette nouvelle activité ne doit pas révéler l’existence d’une situation de conflit d’intérêts lorsque la personne concernée exerçait ses fonctions publiques. Un tel risque est plus fréquent lorsque la nouvelle activité est exercée dans le même secteur économique. A ce titre, un responsable public ne peut pas se servir de ses fonctions pour préparer sa reconversion professionnelle. Enfin, la Haute Autorité vérifie que l’activité envisagée ne remet pas en cause le fonctionnement indépendant, impartial et objectif de l’institution publique dans laquelle l’intéressé a exercé ses fonctions. En fonction des risques identifiés, la Haute Autorité peut déclarer l’activité incompatible ou formuler des réserves.
Le contrôle de la déontologie des agents publics (loi 83-634 portant droits et obligations des fonctionnaires)
La loi du 6 août 2019 de modernisation de la fonction publique a procédé à une modification profonde du contrôle déontologique des agents publics dans le cadre de leurs mobilités entre les secteurs privé et public, fondé désormais sur trois principes :
1) L’internalisation du contrôle
Le contrôle déontologique de la très grande majorité des agents publics relèvent désormais de l’administration elle-même. Ce contrôle est internalisé, dans la mesure où il est effectué par le supérieur hiérarchique de l’agent concerné, qui peut consulter le référent déontologue en cas de difficulté sur la réponse à apporter à la situation. Le supérieur hiérarchique prend lui-même la décision quant à la faisabilité du projet de l’agent public (reconversion professionnelle ou cumul d’activités) ou à la nomination d’un agent public, issu du secteur privé, dans un emploi de la fonction publique.
2) La saisine facultative de la Haute Autorité selon un principe de subsidiarité
Le contrôle déontologique principal, internalisé, peut nécessiter l’intervention de la Haute Autorité, selon un principe de subsidiarité : si l’autorité hiérarchique a un doute sérieux sur le projet en cause, même après avoir saisi le référent déontologue, elle peut saisir la Haute Autorité. Cette saisine est facultative et subsidiaire : elle ne peut porter que sur la reconversion professionnelle des agents publics, leurs projets de création ou de reprise d’entreprise, et les nominations dans certains emplois énumérés dans le décret 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique.
> Schémas récapitulatifs de la procédure de saisine subsidiaire en cas de création/reprise d’une entreprise ou d’une reconversion professionnelle dans le secteur privé et en cas de nomination
3) La saisine obligatoire de la Haute Autorité dans certains cas stratégiques
Pour certains agents, la saisine de la Haute Autorité est obligatoire. Il s’agit, d’une façon générale, des personnes nommées dans les plus hauts emplois des trois fonctions publiques. Cette compétence obligatoire de la Haute Autorité est restreinte aux emplois stratégiques suivants :
- > Pour la reconversion professionnelle dans le secteur privé, la création et la reprise d’une entreprise :
- Les emplois énumérés dans un décret 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique
- > Pour la nomination à certains emplois :
- Les directeurs d’administration centrale et les dirigeants d’un établissement public de l’Etat dont la nomination relève d’un décret en Conseil des ministres ;
- Les directeurs généraux des services des régions, des départements, des communes de plus de 40 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 40 000 habitants ;
- Les directeurs d’établissements publics hospitaliers dotés d’un budget de plus de 200 millions d’euros ;
- Les membres des cabinets ministériels et les collaborateurs du Président de la République.
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